Alain Robert
lézard-chaman des mondes urbains


par Philippe Krebs,    

 

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A 42 ans, Alain Robert continue de grimper les plus hauts buildings du monde : l’Empire State Building, le Golden Gate Bridge de San Francisco, la Tour Sears de Chicago, et récemment (samedi 25 décembre 2004), Taipei 101, le gratte-ciel le plus haut du monde situé dans la capitale taiwanaise.

Le 27 novembre 1996, il gravit le Fare East Finance Center de Hong-Kong. Il ne met que 25 minutes pour escalader les 48 étages de ce gratte-ciel d’or. Bluffée par l’audace du grimpeur, la police ne menotte pas Alain Robert, mais l’emmène au poste. Le juge chargé de l’affaire lui demande seulement de signer une promesse de ne pas récidiver pendant un an à Hong-Kong. Depuis cette ascension, les Chinois le surnomment le « Bruce Lee de la grimpe ».

Le 6 novembre 1998, il escalde le Sinjuku Center Building Tokyo, au Japon. Arrêté par la police, il sera battu et retenu en détention pendant cinq jours. Condamné à vingt-trois jours de préventive, il a été libéré au bout de cinq jours grâce à l’intervention de l’Ambassade de France.

Le 20 août 199, il grimpe le long des façades des Sears Tower de Chicago hautes de 443 mètres. Pour cela, il lui aura fallu cinq années de réflexion. La première heure d’escalade ne pose pas de problèmes majeurs mais les derniers étages sont dans la brume et la paroi de verre est glissante. La semelle de ses chaussons n’adhère plus et les derniers étages seront pour Alain Robert, les mètres les plus difficiles de sa carrière de grimpeur urbain.

Plus connu sous le nom de Spiderman (l’homme-araignée), l’enfant de Pézenas est passé des falaises de Valence aux monuments architecturaux du monde moderne, quittant, le temps de parades médiatiques retransmises sur toutes les chaînes du monde, les gouttes d’eau et les réglettes naturelles des falaises (petites prise formées par l’érosion du rocher) pour les failles architecturales (souvent des fissures sur la façade prévues pour le passage des nacelles de laveurs de carreaux).

Il est le seul grimpeur au monde à pratiquer l’escalade extrême en solo, une escalade « à mains nues », sans corde ni matériel d’assurance.

De l’avis même des pros, Alain Robert est devenu définitivement hors niveau : "On a peine à comprendre l’univers mental d’Alain, sa manière de défier volontairement la mort met la raison en échec. Nombreux sont ceux qui considèrent son solo de « la nuit des lézards » comme la plus difficile et la plus téméraire jamais réalisée au monde » (Heinz Zak).

Ou encore : " Alain, je le connais un peu. Beaucoup de gens le critiquent, disent qu’il est barge, mais c’est un mec exceptionnel parce qu’il va au bout de ce en quoi il croit. Peut-etre qu’il va trop loin, il est très médiatisé. Mais interieurement il vit quelque chose de vraiment fort. J’admire son courage et, pour moi, c’est pas du tout un fou." J.B. TRIBOUT - ( Grimpeur de Haut Niveau )

Dans son livre l’Homme-araignée, publié au Cherche-midi, Alain Robert nous plonge dans son histoire, dans sa folie et son discernement. Ou comment cet homme au look d’indien avec ses pantalons en cuir bleu, ses colliers, et sa boucle d’oreille en forme de plume, est arrivé, souvent sans y être autorisé et sans autre équipement que ses mains, à gravir les cimes du monde urbain ? Avec courage, beaucoup de préparation, et la soif de toujours se dépasser.

Alain Robert, il faut le savoir, est invalide à 60 % (un paraplégique pour exemple sera déclaré invalide à 70 %). En septembre 1982, il fait une chute de vingt mètres du haut d’une falaise : coma stade 2, fracture du crâne, oedème cérébral, fracture ouverte des deux os des deux avant-bras, fracture et luxation de la tête radiale du coude droit, fracture du bassin, paralysie par compression du nerf cubital (coude), fracture du nez.
Les médecins le pensent perdu. Alain Robert s’astreint à une rééducation forcenée, jusqu’à quasiment retrouver son corps d’avant, moins de souplesse, moins d’allonge, mais la hargne intacte.

Alain Robert a une femme et trois enfants. Quand il jongle avec les osselets de la mort, le temps se suspend. Comportement suicidaire, fureur de vivre ou rage de vaincre ?

Alain Robert est un chaman, un rebelle, un marginal, de la trempe des plus grands aventuriers que la terre ait porté. Cheveux aux vents, magnésie aux doigts, il s’est retrouvé plus d’une fois hors-la-loi aux quatre coins du monde, accumulant les journées de prison, en Malaisie, à Brooklyn, etc.

Son livre est un régal de lucidité, d’orgueil et d’équilibre, une suite d’aventures fabuleuses aux confins du monde techniciste, une giffle à la gueule des faucons de la politique du vide, un coup de sabre dans le bloc de monotonie qui ouvre sur la prise de conscience d’un destin exceptionnel, celui d’un gamin qui continue de s’amuser avec les plus énormes jouets architecturaux de la planète terre.

Alain Robert, l’homme-araignée est publié aux éditions du Cherche midi

Le site officiel d’Alain Robert

Crédit photographique : Alexis Orand (source http://www.alainrobert.com/)

 


Philippe Krebs

Né à Metz, Philippe a grandi avec son père (fondateur du centre Emmaüs de Forbach) dans une ambiance de soupe populaire. Il a en a gardé le sens des relations humaines et un profond respect de la différence. Éditeur de livres et revues d’art pendant dix ans , co-organisateur d’un festival nomade de performances poétiques (Teranova). Un temps spécialiste du groupe Panique (Topor, Arrabal et Jodorowsky). Acrobate professionnel pendant dix autres décennies, il décide en 2014, de remettre le bleu de chauffe pour aller peindre sur les routes, dans des sites abandonnés, mais aussi dans son atelier lyonnais, ainsi qu’un peu partout dans le monde (Europe, Afrique, Asie).

 




 

 

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